Passe le temps
La vie est courte, la vie s’en va et passe le temps
Aujourd’hui toi et moi côte à côte, et demain ?
Alors que l’avenir nous paraissait lointain
Là on se voit vieillir ensemble, mais comment ?
Seras-tu la même qu’aujourd’hui une fois vieillie ?
Te souviendras-tu des épreuves franchies à deux
Celles qui nous ont rendus plus matures et plus vieux ?
Serai-je assez vivant pour tes désirs, tes folies ?
Oserai-je te dire pour toutes ces années merci
Sans toi je suis sûr le chemin n’aurait pas été
Même quand nos vies viendront à se séparer,
À tout jamais elles seront liées c’est ainsi
Saurons-nous aimer cette moitié vieillissante
Fatiguée, irritée, blessée, différente
Quand la mémoire et la vue seront défaillantes
Et la surdité patente et isolante
Ce qui nous lie aujourd’hui ne nous liera plus
Trouverons-nous la force et l’envie de poursuivre
D’autres airs pour de nouveaux chemins à suivre
Demain quand nous aurons ensemble assez vécu
Quand nos chères formes seront devenues difformes
Et quand nos traits n’auront plus les mêmes attraits
Nos yeux sauront-ils voir derrière le portrait
Ce cœur joyeux prisonnier de nos autres formes
Quand la peau hier si fragile si douce si lisse
Demain sera calleuse laide et informe
Mes mains sauront-elles reconnaître tes formes
Quand la caresse voudra effleurer le vice
Si ton caractère ou le mien un jour devient
Même avec les nôtres, aigri et irritable
Saurons-nous accepter l’autre impitoyable
Sans la moindre rancœur comme si tout allait bien
Quand l’humeur, dès le matin, sera silence
Quand la patience sera partie dans les vagues
Toute conversation finissant en schlague
Endurcis nos caractères seront violence
Combien d’années de partage dans le bon vent
Avant de lui faire face pour découvrir l’amour
Savoir aimer, savoir accompagner, toujours
La vie est courte, la vie s’en va et passe le temps
Si tu ne fleuris pas les tombes
Mais souvent penses aux absents
Ni ne vas aux funèbres pompes
Pour veiller un proche parent
C’est que tes pleurs sont trop intimes
Ils coulent en dérivant les yeux
Sur le chemin des abîmes
En se foutant pas mal de dieu
Si tu ne cours aux funérailles
Et n’apprécies guère les églises
Si tu aimes les retrouvailles
Les journées les plus grises
Mais tu chéris en silence
Sans les arts mortuaires
Sans les idiotes croyances
Les défunts dans l’ossuaire
Quand tu cherches un cœur parti
Et que seul tu partages la peine
Tu sais bien qu’avec ou sans cris
Ce soir, ta tristesse est bien vaine
Alors en ton for intérieur
Tu gardes l’angoisse et la peur
Si tu ne pries pas dehors
C’est aussi que tu as peur de la mort
Pourquoi ce soir finir sa vie
Sur un chemin inaccompli ?
Mille et une fois j’en ai pleuré
De ce malheur à partager.
Pour mes proches qui devront rester
Moment de peine à surmonter,
Douleur pour une banalité.
La vie la mort absurdité.
Toute ma vie j’ai rêvé que le temps s’arrête
Suivant Einstein les yeux fermés lâchant ma tête
J’ai couru vite, toujours plus vite, beaucoup trop vite
Mais je n’ai pu stopper le flux vaincre le mythe
Lâchant du leste ces derniers jours pour mieux vieillir
J’ai fait le geste pour à mon tour ne plus subir
Le temps qu’il reste avec amour pour en finir
Une fin funeste et sans retour je vais mourir